compitalia


COMPITALIA.—Fête des Lares compitales, protecteurs d'un compitum et des vici ou pagi qui y confinaient. Elle était au nombre des fêtes mobiles (conceptivae feriae), dont l'époque devait être fixée par un prêtre ou un magistrat. Chaque année le préteur en annonçait la date. Elle se célébrait au milieu de l'hiver, peu de jours avant les Saturnales, quand, l'année terminée, ceux qui avaient travaillé se reposaient. Alors les paysans venaient au compitum déposer auprès des Lares les jougs brisés, symbole du labeur accompli, et, des maisons du voisinage, on leur apportait des présents, gâteaux, bandelettes, pièces de vêtement; on suspendait devant leurs images des pelotes et des poupées de laine (maniae), qui étaient censées représenter les membres de la famille : simulacre de sacrifice funèbre par lequel on croyait obtenir que les vivants fussent épargnés. Ce n'étaient pas les hommes libres qui étaient chargés de ce soin, mais les esclaves; le vilicus sacrifiait au lieu de son maître sur l'autel du compitum rustique, et celui-ci ajoutait ce jour-là quelque chose à la ration de ses servi-leurs'. Il semble que cette fête, dans laquelle subsistait un reste de la vie ancienne du Latium, appartînt plus particulièrement aux ouvriers les plus humbles des champs et de la ville et que l'on estimât leur service plus agréable aux Lares. De là vient peut-être qu'on attribua l'institution des compitalia au roi Servius Tullius, qui était d'après les légendes, fils d'une esclave et aussi du Lar familiaris de la maison des Tarquins. On la rattacbait encore à la division faite, disait-on, par le même roi des quatre régions de la ville de Rome en un certain nombre de vici; c'est lui qui aurait alors placé dans les compita les chapelles des Lares et réglé leur culte.

On transportait ainsi les souvenirs d'une antiquité plus reculée dans la Rome de la République. Une pareille division administrative n'appartient pas à Servius; il est vrai que, dès le temps des rois, la ville était formée de vici, et que les compita qui leur servaient de centres furent, dès l'origine, des lieux de rassemblements populaires, particulièrement animés à l'époque des compitalia : des lutteurs, des faiseurs de tours, des acteurs de toute espèce s'y donnaient en spectacle. Ces sortes de fêtes foraines (ludi compitalicii) accompagnaient les sacrifices aux Lares, et, comme dans d'autres jeux on promenait solennellement des images des dieux, il semble que dans ceux-ci les figures des Lares aient été aussi portées en procession. On voit cette cérémonie représentée dans un fragment de bas-relief du musée de Latran. Un CAMILLUS tient la statuette qui représente l'un des deux Lares; celle du second était sans aucun doute dans les mains d'un autre camillus qui précède celui-ci. Auprès d'eux marchent des
personnages en toge : ce sont les vicomagistri, qui pour les cérémonies des  compitalia revêtaient la toge prétexte.

Des sociétés (collegia compitalicia), composées d'esclaves et d'affranchis, se formèrent pour la célébration des fêtes, sous la direction de ces magistri, qui n'avaient pas encore, sous la république, de fonctions officielles; 
des hommes riches et ambitieux y trouvèrent un moyen d'acquérir une grande influence : ils donnèrent des jeux et recrutèrent des partisans dans les collèges, qui devinrent bientôt un danger public : ce fut la cause qui fit supprimer par Jules César, puis par Auguste, tout à la fois les collèges et les jeux. Plus tard Auguste rétablit le culte des Lares compitales en y adjoignant celui du Genius Augusti, c'est-à-dire de son propre Génie, qui devint ainsi une troisième divinité associée aux honneurs des Lares compitales dans tout l'empire. Mais il ne permit pas aux collèges de se reformer; il chargea de nouveaux magistri, choisis chaque année parmi les habitants des vici, d'organiser les jeux et d'y présider (vicomagistri), et voulut qu'on les célébrât deux fois par an, en mai et en août, probablement le premier jour de chacun de ces mois. On trouve néanmoins la fête des compitalia inscrite encore aux 3, 4 et 3 janvier dans les calendriers du bas-empire.
                                      E. Saglio.